Les deux « monothéismes » 2
24 Φεβρουαρίου 2010
Il vaut de s’arrêter un peu sur Plotin, qui représente peut-être le sommet de l’Antiquité non biblique, et dont la pensée sera assimilée et utilisée par de nombreux Pères (recevant par eux un véritable accomplissement).
Pour Plotin, le premier degré de la connaissance se situe dans l’âme du monde, qui intègre l’unité diverse du cosmos et dont les dieux sont autant d’aspects.
Au-dessus, en l’homme comme au cœur du monde, l’intelligence, degré plus élevé d’unité. Ce niveau du noûs est aussi celui de l’être ou plutôt, il y a identité du noûs et de l’être, de la pensée et de son objet ; l’objet existe parce qu’il est pensé, la pensée parce que l’objet en définitive se ramène à une essence intellectuelle. Cette identité cependant n’est pas absolue, puisqu’elle se transcrit dans une réciprocité alternante où l’altérité subsiste encore. Pour connaître pleinement l’un, il faut donc transcender le noûs.
Quand on dépasse la pensée et la réalité pensée, l’ultime dyade de l’être et de l’intelligence, on débouche dans la non-intelligence et le non-être, la négation marquant ici un plus, une transcendance. Mais alors le silence s’impose : on ne peut nommer l’ineffable, puisqu’il ne s’oppose à rien, puisque rien ne le limite. Le seul moyen de l’atteindre c’est de ne pas le connaître : la non-connaissance, percée au-delà de tout, est extase. La philosophie culmine et se suicide au seuil de l’inconnaissable. On ne peut connaître l’Un qu’avant et après l’extase, c’est-à-dire ne pas le connaître puisque ce n’est pas l’extase. Et pendant celle-ci, il n’y a plus d’autre, donc de connaissance. Quatre fois dans sa vie, nous dit Porphyre, Plotin connut l’extase. Mais cette connaissance de la nature divine s’accomplit et s’annule à la fois dans l’impersonnalité de l’inconnaissance.